À VOS AFFAIRES. J’écoutais, il y a quelques semaines, une belle présentation sur YouTube qui montrait comment transférer de l’argent de votre REER à votre CELI sans impact fiscal. M’intéressant à ce genre de question, j’étais très intrigué de voir comment on pouvait faire ça sans magie.
Voici ce qu’on vous propose si vous avez de bons montants accumulés dans votre REER et votre CELI : 1. Vous retirez des sommes de votre REER ou de votre FERR; 2. Vous mettez en place un prêt hypothécaire où vous êtes le prêteur; 3. Vous empruntez (à vous-même) pour investir dans ce prêt hypothécaire.
A priori, aucun des éléments ci-dessus n’est problématique, mais on doit comprendre que ce n’est pas parce que certaines transactions sont autorisées par le fisc que l’ensemble de la situation tient la route. Regardons toutefois de plus près.
En premier lieu, vous devez vendre tous vos titres détenus dans votre REER et votre CELI. Des gains en capital sont générés, mais ce n’est pas un problème en raison des règles fiscales liées à ces comptes.
Par la suite, vous mettez en place un prêt hypothécaire sur votre résidence pour lequel votre REER et votre CELI sont les créanciers. Autrement dit, ce sont ces comptes qui vous prêteront de l’argent personnellement — en mettant votre résidence en garantie — et qui vous chargeront des taux d’intérêt. L’argent prêté sera simplement déposé dans un compte non enregistré.
Des conditions à respecter
Plusieurs critères doivent être respectés. Il faut notamment que les prêts soient assurés par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) et que les versements prévus soient effectués. Cette stratégie est permise depuis 1984, sous le nom de REER-hypothèque. Pas de problème jusque-là, sauf si votre compte non enregistré est investi sous forme d’actions d’une société du promoteur.
Les hypothèques peuvent être de premier ou de deuxième rang et les taux utilisés doivent refléter ceux du marché. C’est ici que les promoteurs de ce stratagème étirent trop l’élastique au goût de l’Agence du revenu du Canada (ARC).
On attribue ainsi une hypothèque de premier rang au REER, qui chargera un taux d’intérêt faible, et une de second rang au CELI, qui ne se gênera pas pour charger cher d’intérêt, jusqu’à 15 %! Il faut comprendre que plus le prêt du CELI aura un taux d’intérêt élevé, plus vite l’argent passera de votre REER à votre CELI.
Or, l’ARC dit : «Ceux qui tentent l’expérience s’exposent à de graves conséquences fiscales.» En effet, selon elle, les taux d’intérêt élevés chargés par le CELI n’ont pas lieu d’être étant donné que le risque de défaut de paiement est nul par définition (sinon, la stratégie ne fonctionne simplement pas).
Comment l’argent circule-t-il dans ce stratagème ? D’abord, chaque année, on fait un «retrait» d’un FERR.
À noter que ce pourrait ne pas être un vrai retrait en espèce, le FERR ne pouvant possiblement contenir qu’un investissement sous forme de prêt, du moins au début.
Ensuite, les versements doivent être faits aux créanciers. C’est alors que vous remettez de l’argent dans votre REER et votre CELI selon les taux d’intérêt convenus pour chacun. Vous prenez simplement l’argent de votre compte non enregistré pour effectuer ces remboursements.
Côté fiscal, comme votre REER et votre CELI vous prêtent de l’argent que vous investissez dans un compte non enregistré, les intérêts qu’ils vous chargent seront déductibles de n’importe quel revenu au fédéral — dont votre retrait FERR. Au Québec, la déduction s’applique au revenu de placement de votre compte non enregistré et à l’excédent étant gardé en réserve pour le futur.
Aussi simple que cela… disent-ils.
Si vous êtes déjà pris dans l’un de ces stratagèmes, l’ARC vous recommande de faire une «divulgation volontaire». Ce n’est pas agréable, mais c’est mieux que la prison…